Si la publicité suit les valeurs de la société et les influence, les marques n’ont pas d’autre choix que de suivre les mouvements sociétaux
Pour Abercrombie & Fitch avec ses iconiques mannequins et vendeurs recrutés pour leurs abdominaux, le changement de politique épouse autant l’époque qu’un changement de stratégie business imposé par une série de scandales. En 2006, le PDG Mike Jeffries divise : « Dans chaque école, il y a les enfants cool et populaires, et puis il y a les enfants pas tellement cool. En toute honnêteté, nous nous adressons aux enfants cool » et en remet une couche : « beaucoup de gens ne correspondent pas à nos vêtements, et ne le peuvent pas. Est-ce que nous faisons de l’exclusion ? Absolument ».
Une autre polémique sur son marketing hypersexualisé fait à nouveau chuter les ventes de la marque en 2013, quand son patron se félicitait de ne plus proposer de taille XL ou XXL au rayon femmes : « il ne veut pas de gros dans ses magasins, il veut des gens beaux et minces ».
Signe des temps, aujourd’hui « Abercrombie Today » diffuse sur les réseaux sociaux une campagne célébrant la diversité. Et le discours a radicalement changé : « Abercrombie n’est pas une marque où l’on doit s’intégrer – c’est une marque où chacun a sa place. Nous dirigeons avec détermination, et cet esprit d’inclusion et d’équité est présent dans tout ce que nous faisons », déclare Fran Horowitz, l’actuel PDG.
Ou comment passer de l’apologie de corps bodybuildés à l’inclusion de tous les corps en une petite décennie.
Si la publicité suit les valeurs de la société et les influence, les marques n’ont pas d’autre choix que de suivre les mouvements sociétaux comme le confirme le cabinet Nielsen, rapportant que « avec 43% des 75 millions de Millennials aux États-Unis s’identifiant comme afro-américains, hispaniques ou asiatiques, si une marque n’a pas de stratégie multiculturelle, elle n’a pas de stratégie de croissance ».
Et les attentes consommateurs ne s’arrêtent pas à la sphère de la marque : 90% des consommateurs estiment que les entreprises ont la responsabilité de regarder au-delà du profit et d’améliorer l’état du monde ! Rien que ça…
Stratégie multiculturelle, body-positivity, équité… les notions s’enchassent et mieux vaut être bien conseillé pour éviter le faux-pas et la communication de crise.
Partenaire marketing influent, l’éditeur de logiciels Salesforce a défini l’an dernier 6 principes du marketing inclusif dont « éviter l’appropriation » et « promouvoir des contre-stéréotypes » au sein d’un programme d’auto-apprentissage en ligne, « Equality Trailhead, Inclusive Marketing Principles », pour favoriser les pratiques inclusives. Une démarche parmi tant d’autres qui nous enjoint à nous former pour accompagner au mieux les marques dans leur repositionnement, leurs stratégies RSE en particulier et dans toutes les formes de brand content et content marketing.
Au sein des agences, parce que notre créativité et nos conseils reflètent et s’inspirent de la société, nous contribuons au maintien ou à la réduction des stéréotypes. Notre vision des personnes qui composent la société façonne en miroir celles des consommateurs.
« Confrontés à 10 000 marques quotidiennement, même s’ils ne les regardent pas avec attention, des études scientifiques ont prouvé qu’une stratégie publicitaire efficace a un impact sur la psychologie des prospects. » nous explique Didier Courbet Professeur des Universités et Chercheur à l’Université d’Aix-Marseille.
Parce qu’une personne sur quatre est en situation de handicap, mais que seulement 1 % des publicités les représentent, la campagne « I’mPossible » d’adidas prend dès lors tout son sens malgré sa propension caricaturale.
Écrire de nouveaux récits publicitaires qui touchent au cœur, promouvoir des contre-stéréotypes, c’est possible.
C’est même indispensable.
1 étude Facebook et Geena Davis Institute – mars 2021
2 Camille Gantzer, rédactrice en chef chez Décryptage Citoyen International.