Le marketing d’une entreprise en réseau suppose généralement un équilibre complexe combinant centralisation et décentralisation de la communication. Cette problématique concerne les enseignes de distribution, mais aussi les réseaux d’agences (banques, assurances, sociétés de courtage, ou encore agences de voyage).
D’un côté, la communication doit être harmonisée pour contribuer à la construction de la marque, et respecter un cadre commun. Toute campagne locale participe à un effort de communication plus global de la marque, et bénéficie d’un investissement mutualisé.
D’un autre côté, pour une communication efficace, personnalisée et agile, la marque doit s’appuyer sur les différents niveaux du réseau pour déléguer l’adaptation et l’exécution des campagnes. Cela tient à la prise en compte de paramètres locaux (médias, événements, concurrence…) mais aussi à une meilleure connaissance du terrain et des profils de client.
C’est cet équilibre que le marketing multi local doit favoriser, et notamment grâce à la mise en place du “marketing distribué” ou décentralisé.
Quels en sont les principaux cas d’usage du marketing distribué ? Concrètement, quels sont les prérequis et les solutions pour le mettre en œuvre ?
1. Qu’est-ce que le marketing distribué ?
Le marketing distribué (ou marketing décentralisé) est une approche de marketing dans laquelle les responsabilités de la planification, de la mise en œuvre et de la gestion des campagnes de marketing sont réparties entre plusieurs parties prenantes, plutôt que d’être centralisées au sein d’une équipe de marketing unique. Cela peut inclure des départements tels que les ventes, les partenaires, les filiales et les unités d’affaires distinctes, ainsi que des partenaires extérieurs tels que des agents de vente, des revendeurs et des affiliés.
2. Ce qui doit être centralisé dans un dispositif de communication multi-local
2.1. Diffusion de l’identité de la marque
Dans un contexte de communication d’une entreprise avec un réseau, la priorité est de diffuser et préserver les codes de la marque : son identité, sa charte graphique et éditoriale, ses codes de communication. Ce travail de branding doit être centralisé, pour garantir l’investissement suffisant, une vision globale, et la cohérence de la marque.
2.2. La stratégie marketing
La stratégie marketing doit être définie dans ses grandes lignes à un niveau national. Par exemple, la stratégie de positionnement en termes de prix, d’image, les angles de communication ou le ciblage d’audience sont communs à l’ensemble du réseau, car en général peu sujets à des variations de paramètres locaux.
2.3. Les concepts de campagne
La stratégie marketing étant généralement définie au niveau national, les concepts de campagne le sont aussi.
Par exemple, en 2022, l’enseigne de distribution Aldi qui se développe en France et en particulier en région parisienne a choisi de mettre l’accent sur la multiplication des points de vente, et donc de la proximité entre les consommateurs et un magasin Aldi. Ce concept répond à la fois à une stratégie nationale (développement du réseau dans certaines villes), tout en ayant un paramètre évidemment local (le message n’est diffusé qu’à proximité des nouveaux points de vente).
2.4. La production des assets
Une fois les concepts définis, la production des campagnes est généralement assurée par l’entité centrale. Les différents formats sont les entités locales peuvent avoir besoin sont anticipés, et l’ensemble des principaux assets sont produits au niveau central : visuels, films, emails, bannières… L’enjeu est ensuite de rendre accessible ces assets et d’en permettre la personnalisation avec des règles très précises.
3. Ce qui doit être décentralisé : les cas d’usage du marketing distribué
3.1. La gestion de la relation client
La relation client est un sujet marketing éminemment local. La connaissance des clients est d’abord une affaire de terrain : les agents et responsables commerciaux locaux rencontrent les clients, ont un lien régulier avec eux, et connaissent mieux leurs problématiques, à la fois au niveau individuel et au niveau de l’ensemble de la clientèle locale.
La gestion de la relation client doit donc laisser une part d’autonomie importante au local, que ce soit pour la relation commerciale ou le service client après l’achat.
Les scénarios de communication peuvent être conçus au niveau central, afin de diffuser les bonnes pratiques en marketing relationnel et faire profiter à chaque responsable local de l’expérience du réseau. Mais d’une part, ces scénarios doivent être conçus avec l’apport des responsables terrain lors d’ateliers, et d’autre part, une certaine latitude dans l’exécution doit être laissée aux responsables du commerce et de la relation client dans le réseau.
Le déclenchement d’un message doit pouvoir être bloqué (inhibé) par le responsable de la relation client s’il gêne une action en cours avec ce client. Inversement, le service client doit pouvoir déclencher lui-même un scénario pré-conçu au niveau du marketing national.
La solution de “geste d’attention” conçue pour La Banque Postale et mise à disposition de son réseau d’agents en est un parfait exemple. Chaque agent peut déclencher l’envoi d’un cadeau à un client, pour le remercier ou le dédommager, avec un niveau de valeur choisi par l’agent : celui-ci est donc autonome (il décide à qui et quand il envoie un cadeau, et il fixe la valeur). Mais certaines règles sont fixées au niveau nationale : création de l’email d’envoi du cadeau, paliers de valeur et catalogue de cadeaux, et nombre maximum de cadeaux pouvant être envoyé par un agent sur une année.
3.2. Les campagnes de communication localisées
Les campagnes de communication d’un réseau peuvent parfois être personnalisées pour valoriser la proximité des points de vente, le service local. Cela passe par la personnalisation des messages avec des données locales, ou avec la mise en avant de responsables de clientèles locaux, ou de “vrais” clients. Ce type de campagne suppose la participation de chaque agence ou point de vente, dans un objectif de campagne commun.
Avec la campagne “Rebons”, l’entreprise d’assurance AXA offre aussi un bel exemple de concept de campagne de communication nationale avec une personnalisation et une forte implication de l’échelon local. Les Rebons sont des bons de 20€ distribués par les agents à leurs clients particuliers à utiliser chez les commerçants de proximité. Les agents généraux personnalisent les bons en référençant eux-mêmes les commerçants :
3.3. Les partenariats et le sponsoring
Les partenariats ou le sponsoring sont aussi un cas d’usage récurrent pour la communication localisée. Pour réellement personnaliser la stratégie marketing au contexte de chaque région, le choix des partenariats repose souvent sur les unités locales, tout en répondant à des critères définis au niveau du marketing national (voire global).
Ainsi, la mutuelle MGEN a conçu un programme d’offres avantages réservées à ses adhérents, intégrant à la fois des partenaires nationaux et locaux. Les partenaires locaux ont souvent des relations historiques avec les sections locales de la mutuelle : des théâtres, des cinémas, des musées ou centres culturels, etc. Le cadre est celui d’un programme avantages global avec une sélection d’offre sur des thématiques définies (en particulier, la culture et les loisirs), mais la négociation des offres est faite par chaque section.
On retrouve cette logique dans le marketing sportif. Par exemple, l’enseigne de commerçants U de Pleurtuit communique sur le sponsoring du Triathlon de Dinard. Les assets de communication sont spécifiques et localisés (porte d’arrivée du triathlon, encart de contenu dans un email aux participants…), mais ils sont produits en complète conformité avec les guidelines de la marque.
4. Prérequis des solutions de marketing distribué
Plusieurs solutions répondent à des besoins de marketing distribués. Parmi les solutions majeures, il y a bien sûr Salesforce Marketing Cloud. Mais il existe également des solutions plus spécialisées dans ce domaine, notamment en France : SmartProfile, Scal-e, ou encore The Ramp.
Les prérequis d’une solution de marketing distribué dépendent du contexte de la marque, mais généralement, on retrouve les besoins suivants.
4.1. Centraliser les assets de communication
La première condition du marketing distribué est de centraliser les éléments de communication : contenus, templates, assets. Ceux-ci peuvent ensuite être exploités et adaptés par le réseau.
4.2. Architecture CRM distribuée en réseau
Le marketing comprend le volet relationnel : PRM, CRM. Le marketing relationnel doit aussi être pris en main par le réseau, et pour cela, l’architecture des données PRM/CRM doit correspondre à l’organisation du réseau. Ainsi, par exemple, chaque point de vente dispose des données de ses prospects et clients, de façon cloisonnée. Dans le cas d’un réseau avec des franchises, il est même commun que le siège n’ait pas accès aux données PRM/CRM des franchisés, qui sont propriétaires de ce “capital” data.
En revanche, les scénarios marketing conçus par le siège doivent pouvoir être exécutés localement, avec les données PRM et CRM associées aux points de vente et franchises.
4.3. Gérer les rôles avec un arbre de droits
L’arbre de droits permet de définir, pour chaque administrateur de la solution, les droits qui lui sont données : fonctionnalités du back office, niveau d’édition, périmètre de data (local, national…). Du fait de la multiplicité des entités intervenant sur les campagnes marketing dans un réseau, l’arbre de droits est central.
4.4. Déclencher des campagnes sur différents canaux marketing, au niveau global et local
La solution de marketing distribué doit permettre de planifier les actions marketing sur un grand nombre de canaux : les canaux marketing direct (email, SMS, courriers…), mais aussi les leviers publicitaires (social ads, display…).
5. Pilotage du marketing local
5.1. Gestion des budgets
Dans le marketing multi-local, le budget est généralement réparti entre un volet national (les campagnes de communication de marque) et un volet local (les campagnes tactiques d’acquisition, les campagnes CRM ou les événements locaux). Le dispositif de marketing distribué doit permettre cette gestion hybride.
Dans certains dispositifs marketing, la gestion budgétaire peut être plus complexe : par exemple, dans le cas du parrainage pour un réseau d’agences (banque, assurance…). Le coût de la récompense des parrains doit généralement être prélevé sur le budget de l’agence qui convertit le filleul en client.
5.2. Pilotage de la performance
La communication multi-locale requiert aussi un outil de pilotage de la performance adapté, permettant à des administrateurs au siège de piloter l’ensemble des performances, et à des administrateurs dans les filiales de piloter les performances de leurs campagnes.
Pour répondre à cet enjeu dans le cas des marques de retail, l’agence Dékuple a mis au point un outil de pilotage permettant de suivre les performances d’un réseau de magasin, en multi-leviers.
Les expertises de l’agence pour la communication en réseau